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Un employe de la compagnie des trains me conduit jusqu'a mon compartiment. Une seule personne me rejoindra, et le wagon me semble a moitie vide. Je ne risque pas d'etre derangee ! La porte de communication entre notre wagon et ceux des secondes classes avec sieges inclinables est condamnee. Les touristes occidentaux peuvent dormir en se sentant vraiment en securite !...

Par la fenetre du couloir je regarde la pluie tomber sur le quai, jusqu'a ce que le train s'ebranle. La nuit devient de plus en plus noire, je ne tarde pas a regagner ma couchette. Les volets sont deja tires. Le spectacle est fini, je n'ai plus rien d'autre a observer que le plafond du compartiment alors je me couche et m'endors. 

Le lendemain je retrouve avec plaisir des paysages familiers a travers la fenetre du couloir. Que de souvenirs m'evoquent ces villages, ces champs dores et ces collines au-dela desquelles je devine l'ocean ! Comme je me sens differente de celle que j'etais en debarquant du bateau ! Bien plus detendue ! Je guette les premieres maisons de Tanger. Des que le train s'immobilise en gare je descends et me mets en quette d'un grand taxi pour Ceuta. Enfin pour Fnideq, plus exactement, car c'est la que le taxi me deposera. Il me faudra ensuite parcourir environ 3 kms a pieds le long de la cote pour aller jusqu'a la frontiere.

Je trouve sans grande difficulte et me voila embarquee dans un grand taxi, serree contre 3 autres personnes a l'arriere. Le trajet dure un peu moins d'une heure. Les vitres sont grandes ouvertes et l'air frais (enfin par rapport a la chaleur plombante de Marrakech) balaie mon visage. Je me dis que ces marocains-la ont de la chance, pres de l'ocean ils ressentent moins la chaleur en cette periode de ramadan. Nous longeons la cote, c'est joli, je suis sur les hauteurs que j'apercevais depuis Tarifa en me demandant a quoi pouvait ressembler le paysage ici...

Heureusement que le voyage n'est pas trop long car on peut difficilement bouger une fois qu'on est entasses dans ces taxis ! On nous depose a l'entree de Fnideq, qui ne manque pas de charme avec ses murs bl;ancs et ses toits bleus. J'ai apercu quelques panneaux indiquant "Sebta", et entrevu une grande zone industrielle. Je n'ai pas l'intention de visiter Ceuta. Ca ne me dit rien de me ballader en territoire espagnol et de depenser des euros pour le plaisir de manger des patatas bravas ou de boire une biere hors de prix. Je descends de la voiture et marche le long de la grande rue du village avant de descendre vers la plage pour partir en direction de Ceuta. Je me rends compte que si je me sens dorenavant chez moi a Marrakech, ici ce n'est pas tout a fait pareil. Je me sens moins a l'aise en tant que femme seule et non voilee. Evidemment je suis europeenne et ca se voit, donc je n'ai pas grand chose a craindre. Mais c'est juste que du coup je me sens moins detendue, les regards sont plus scruptateurs, on ne me sourit pas, je ne vois pas d'autres touristes, ma presence est un peu incongrue. Ils doivent pourtant en voir passer beaucoup, des backpackers venus prolonger leur titre de sejour ! 

Je marche sous le soleil sur une route qui longe la plage. Ca n'est pas aussi aride qu'un no man's land mais tout de meme je ne vois rien de bien excitant. La-bas au loin la frontiere semble perdue au milieu de rien. Je ne vois quasiment pas de voiture ou si peu. Je dois arriver a la bonne heure, je n'aurai aucune attente ou que ce soit. Cette traversee est un peu glauque, on entre dans une espece de couloir qui ressemble plus a une cage a lapins. Je suis toute excitee a l'idee de me dire que je vais me retrouver en Espagne ! Et malgre tout une petite angoisse m'etreint l'estomac. On ne sait jamais, et si qulque chose ne tournait pas rond ? Et si on ne me laissait pas entrer a nouveau au Maroc ? Bon j'aurai au moins mes papiers, mes sous, ma brosse a dent et une petite culotte de rechange sur moi mais tout de meme... Bref, j'arrive au poste de sortie, un tampon est appose sur mon passeport et zou, en route pour l'Espagne ! Je me sens d'un coup toute legere alors que je m'eloigne de la frontiere marocaine. C'est que je viens de passer dans un territoire non musulman ! Et psychologiquement c'est enorme pour moi. J'attends de m'eloigner encore un peu, et vais m'asseoir sur la plage, suffisamment loin de tout le monde, pour remonter les manches de mon tshirt et boire en toute tranquilite. Il ne s'agit pas que de ne pas observer le ramadan au vu et au su de tout le monde. Il s'agit avant tout de ressentir au plus profond de moi que la ou je suis precisement a cet instant, je me sens libre de penser et de dire ce que je veux. Je peux etre moi-meme. Je n'ai pas a controler mes faits et gestes ni mes dires dans la crainte d'une quelconque reaction de mon entourage. En tant que touriste je pense que je ne crains vraiment rien au Maroc, sauf a avoir un comportement volontairement choquant bien sur. Mais n'empeche, je me rends bien compte, sur cette plage, de la difference psychologique que ca fait, de se sentir dans un pays libre... Enfin en tout cas plus libre que le Maroc, car on peut toujours debattre sur ce qu'implique la vraie liberte et sur notre endoctrinement a nous aussi...

Je decide donc de savourer cette sensation encore un peu meme si je n'ai plus rien a faire ici a part repasser la frontiere dans l'autre sens. Je reflechis a mon avenir et sens que j'ai pris la bonne decision en choisissant de ne pas rester a Priscilla. Je ne me sens pas la force de supporter ce manque de liberte. Et plus le temps passera, plus ca me tapera sur les nerfs d'entendre sans arret chanter le coran a toute heure du jour ou de la nuit. Je ne veux pas qu'on m'impose de religion. Ni celle-la ni une autre. Alors oui j'ai visiblement bien fait de decider de partir quand meme. 

 

Je bouquine une heure, puis rebrousse chemin et prends un orangina dans un cafe avant de repasser sous le regime du ramadan. Je marche 500 metres dans le couloir oppose a celui que j'ai emprunte pour passer en Espagne. A la sortie, on me demande mon passeport et on s'etonne que je ne l'ai pas fait viser a l'entree du couloir. AH parce qu'il fallait ? Personne ne m'a rien demande, on m'a laissee passer comme ca... Bon, demi tour. Heureusement, un gentil douanier me reperera a la moitie du chemin et me tamponnera mon passeport sans que j'ai a refaire toute la boucle. 

 

Et voila, me voici a nouveau au Maroc et pour 3 mois encore si je le souhaite ! La station des grands taxis est en vue. Je vais en trouver un qui part pour Tetouan. C'est sur la route de Chefchaouen et j'aurais pu m'y arreter pour visiter mais j'ai prefere prendre plus de temps a Chefchaouen plutot que de courir. Je laisse mon sac a dos dans le coffre et grimpe a l'arriere du taxi. Je devore les paysages des yeux tout le long de la route. On s'enfonce dans la montagne. C'est joli, ca me change de Marrakech. C'est verdoyant pres des sources d'eau et aride sur les coteaux ensoleilles. 

 

J'entrevois tout de meme la densite et les remparts de Tetouan et ca me donne bien envie. Mais ma decision est prise. Les montagnes s'elevent de plus en plus haut, c'est joli. On imagine une autre vie, ici. Je me fais deposer a la gare des bus. Le guichet est ferme alors qu'a cette heure-ci, d'apres le panneau, il devrait etre ouvert. D'autres personnes attendent comme moi. Bon. Une dame qui patiente aussi m'indique que pour a peine plus cher (10 dirhams de plus), je peux aussi prendre un grand taxi, ce sera plus rapide. J'hesite. Elle se dirige vers les grands taxis, d'ailleurs. Et sans doute m'a-t-elle suggere de faire la meme chose car plus vite le taxi se remplira plus vite il partira. Je consulte mon telephone portable. Le bus ne part que dans une heure et demi, si on me confirme qu'il part bien. Avec un taxi je peux partir plus tot et ca ne coute pas grand chose de plus. Au bout d'un quart d'heure je me decide et je vais vers les grands taxis. A nouveau je mets mon sac a dos dans le coffre. Nous attendons encore un peu puis nous partons. 

Avant d'arriver sur Chefchaouen, le chauffeur fera un stop pour discuter trois minutes avec un gars d'une station service sur la route. J'ouvre la portière arriere de la voiture contre laquelle je suis pressee comme un citron depuis le depart, pour respirer un peu. Est-ce que mon telephone tombe de ma poche a ce moment-la ? Aucune idee. En tout cas a l'arrivee a Chefchaouen, alors que je suis la derniere a prendre mon sac dans le coffre, je constate que je n'ai plus mon telephone portable. Je fouille la voiture, En vain. 

Je m'eloigne du taxi en reflechissant aux consequences. Il faut que je trouve un ordinateur et que je change mes mots de passe pour ma messagerie mail et mon acces a Facebook. Le reste me semble securise.

 

Depuis les fenetres du taxi j'ai guette les toits bleus du village perche dans les montagnes. Une eglise se detache sur le chemin entre le haut de la ville et le sommet des montagnes. Ca m'a l'air bien joli et tres depaysant par rapport a tout ce que j'ai vu jusqu'ici. 

De la station de taxi, je traverse un jardin paisible puis remonte la grande rue qui conduit a l'une des portes d'entree de la ville. Un petit marche aux legumes se tient autour de cette porte. Il fait tres chaud. Les rues sont toutes en pentes. Immediatement je trouve a cette ville un charme incontestable. Je tombe tres vite en arret sur ces murs bleus, blancs, verts, violets, qui lui donnent un cachet particulier et une chaleur douillete. Il regne une tranquilite suprenante apres l'agitation de Marrakech et de Tanger. On a tout a coup enfin de se detendre, de prendre son temps et de savourer le silence reposant. 

Je sors l'appareil photo et degaine regulierement. Les fleurs apportent leur touche de gaite a la palette pastel qui recouvre les maisons, tout comme les zelij et les moulures autour des portes et des fontaines.. La montagne nous observe de loin avec bienveillance. Profitant de ce que je suis en zone touristique clairement identifiee, je me pose sur la terrasse d'un cafe, sur la place principale, et commande un orangina. Un homme nous predit un orage, car selon lui la chaleur accablante de la journee n'est pas normale a cette epoque et ne presage rien de bon.

Je constate que Chefchaouen est archi touristique, tout est mignon et bien agence, fleuri, colore. Il y a un petit cote pas tres authentique qui me gene un peu mais je me laisse gagner sans resistance par le charme de la ville et le plaisir d'etre un peu tranquille au calme dans un decor juste sublime.

Je vais m'installer dans une petite chambre avec vue sur la montagne et la rue principale. Il y fait si bon que je m'endors a moitie sur le lit hyper moelleux. Puis je pars me balader. Mes yeux ne se lassent pas des perspectives que revele chaque virage. Et ca sent bon partout. Je regrette presque de ne pas etre la pour acheter des souvenirs car j'aurai eu du plaisir a faire les boutiques.

D'ailleurs je m'arrete tout de meme dans une boutique et repars avec un pantacourt et des tongs, car mes tongs sont sur le point de lacher (je les porte 24h/24 depuis que je suis au Maroc) et mon pantacourt orange a fini par craquer bel et bien ! La coupe du pantacourt que j'achete est plutot masculine, car les filles ne portent pas ce genre de choses, ici, mais ca passe. Je me promene jusqu'a ce que la nuit tombe, et c'est un vrai bonheur de prendre le temps de vivre. Je deguste un couscous aux oignons caramelises trop bon sur la place, puis profite de la douceur de l'air pour parcourir encore les ruelles de nuit. 

 

Je dors comme un bebe, et me rappelle le lendemain que, prise par le charme de Chefchaouen, je ne me suis pas occupee de mon telephone ! Je trouve un cyber cafe et change mes mots de passe. Entre temps je decouvre que mon telephone a ete utilise a Tanger. 

J'ai un autre telphone portable dans mes affaires a Priscilla, mais si mes souvenirs sont bons je ne l'ai pas encore fait debloquer. 

Je passe une nouvelle journee hyper paisible au soleil a flaner et lire, et je savoure cette liberte de ne rien faire ! C'est vraiment agreable. Alors que je retourne au cyber le soir, j'apprends par un message d'April sur facebook qu'elle a rompu avec son copain la veille, n'a que tres peu dormi ensuite, et ne se sent pas bien. Elle ne me rejoindra pas a Fes. Je suis decue, mais en meme temps finalement ca me laisse donc la liberte de m'organiser comme je veux. 

Le lendemain je redescends les pentes raides qui filent vers la ville basse, et vais attendre une bonne heure le depart du bus pour Fes. Il fait toujours aussi chaud. Je m'isole pour fumer, mais un marocain s'approche de moi et me demande discretement si je peux lui donner une cigarette. Ce que je fais. Il pars la fumer derriere la gare. Je suis suprise. C'est discret sans etre discret, et dans un pays comme le Maroc je doute que tout le monde ne soit pas deja au courant que ce gars-la a fume donc transgresse le ramadan. Mais il ne se passera rien. 

 

Je ne sais plus qui adresse en premier la parole a l'autre mais j'ai commence a discuter avec un responsable regional des infrastructures, venu pour une reunion. En costume - cravate, je le plains d'attendre ainsi sous le soleil. Il leve les yeux au ciel, explique avoir cherche a eviter ce deplacement qui d'apres lui sera parfaitement sterile mais sert a justifier que les gens sont employes pour faire quelque chose... Il me montre sa convocation, et je m'etonne de lire sur du papier a en-tete du francais bourre de fautes si ce n'est d'orthographe au moins de syntaxe, et redige comme les anciens telegrammes (avec les @stop@ entre chaque phrase). C'est un document officiel, ca ?....

Mon bus finira par arriver, on se separe. Pas de clim, et un voisin qui tire tout de suite les rideaux pour qu'on ne meurt pas de chaud. Je somnole et tente d'apercevoir le paysage a travers les rideaux. Le trajet est long. J'arrive un peu groggy. J'attends beaucoup de Fes, la cite imperiale, David m'en a chante les louanges et je sais qu'il y a plein de choses a voir. Je decouvre d'immenses remparts qui cernent la ville, et d'autres fortifications en face, sur les hauteurs des collines environnantes. Ohlala, ca va etre chouette ! C'est quand meme dommage de ne pas avoir la compagnie d'April pour me perdre dans les dedales de la ville. Je m'engouffre dans le premier souk qui s'offre a moi apres avoir passe la porte des remparts, et je debouche sur une grande porte couverte de zelij verts. Un bar - resto est installe a 20 metres en face. On m'invite a boire un verre en terrasse pour l'admirer d'en haut. Allez c'est parti ! Mais en montant les escaliers je derange un des serveurs en train de faire sa priere au 1er etage. Lorsque je l'entends monter les marches du deuxieme etage pour venir me servir, il ahane tout ce qu'il peut, le pauvre, et je culpabilise de le faire monter par cette chaleur en plein ramadan pour me servir un coca bien frais....

Depuis mon promontoire je m'apercois que l'auberge dans laquelle je voulais m'installer - une des plus anciennes auberges de voyageurs ici a Fes - , la Cascade, est exactement en face de moi. D'ailleurs un gars torse nu et queue de cheval depassant de son chapeau de cowboy (ou d'homme du Sahara ?) est assis a la minuscule terrasse. En descendant du bar, je n'ai donc qu'a traverser la rue Serrajine pour aller demander s'il reste de la place. Oui il en reste, et j'atterris dans une chambre au plafond tres haut, au lit double tres moelleux, et a la temperature d'a peu pres 50 degres. Je prends le temps de discuter un peu avec le gardien qui dormait a moitie sur sa chaise, controlant l'acces a la terrasse - restaurant. Ce brave homme au ventre bedonnant se debrouille plutot pas mal en francais et il adore prendre soin des gens. Il sera gentil comme tout avec moi. Il travaille ici depuis tres longtemps, et apprecie cet endroit surtout lorsqu'il a l'occasion de creer des liens avec les gens et de parler avec eux.  


 

C'est la fin de l'apres-midi, je prends le temps de parcourir les quelques rues qui entourent le quartier Serrajine sans trop m'aventurer trop loin pour ce soir. Ca sent l'excitation de fin de journee de jeun. Contrairement a tout ce que j'ai pu voir ailleurs, ici l'excitation est joyeuse. J'entends meme des plaisanteries ! Quelques 5 minutes avant l'heure fatidique ou le muezzin va chanter la fin du jeun, un Allah Akbar fuse pour faire croire qu'il est temps de manger. Et les gens rient. Surprenant.

Ca s'agite, ca court, ca crie. Je monte sur le toit de la terrasse pour observer les familles installer sur leurs propres terrasses tout le necessaire pour le ftour. Tout les monde est a table, autour des plats. Sur ma droite, un homme dans la quarantaine est assis tout seul devant sa petite table ronde sur laquelle le bol de harira et les dattes sont disposes. Comment se fait-il que cet homme n'ait personne qvec qui partager ce repas familial ?

Meme dans notre auberge le personnel se hate de monter sur un coin recule de la terrasse des chaises supplementaires et des assiettes car c'est la qu'ils vont se reunir dans quelques minutes.

 

Je pense a Priscilla. qui se prepare aussi en ce moment... Tout a coup un coup de canon explose dans l'air. Je ne l'ai pas vu venir ! Tire depuis la forteresse en face. J'apercois la fumee qui s'echappe du canon. Immediatement, des cris de joie ont suivi. Je regarde en bas : ca y est, les hommes ouvrent les bouteilles et se passent de main en main le jus d'orange et l'eau. Ou sont les femmes ? Pas dans la rue. En cuisine ?

Je reste  encore un moment a contempler les couleurs du coucher du soleil. par-dela les collines qui entourent Fes. C'est beau et paisible. Puis je descends au niveau de la terrasse - restaurant et m'y installe pour ecrire des lettres. Mon brave gardien regarde tantot les gens en bas, tantot la television qu'il a allumee et qui diffuse de vieux classiques arabes accompagnes d'un orchestre. J'aime cette ambiance retro. Je le dis a mon brave gardien, dont les epaules se redressent et le sourire s'elargit" Et oui, ce que tu vois la ce sont les plus grands chanteurs arabes, mais ils sont morts maintenant, mais ca tu vois, ca n'a pas de prix et moi je les ecoute tous les soirs.... J'aime l'entendre me raconter qui sont ces chanteurs dont je n'ai jamais entendu les noms (en plus je ne suis pas fan de ce style de musique). Je pense a papa, je le vois en train de fredonner les airs des tenors italiens puis brandir les timbres qu'il tient dans sa main, comme pour suivre le rythme des chansons, en commentant : ca, c'etait des chanteurs qui avaient une voix !...

 

Je suis bien, ce soir-la, a ecrire mes lettres dans cette ambiance. Des amis de mon gardien arrivent et tous se mettent a jouer aux cartes autour d'une petite table. Je passe une soiree delicieuse. 

Le lendemain, j'entreprends de partir pour une longue journee de balade. Fes, me voila ! Il fait une chaleur a crever, mon sac a dos est cale sur mes epaules, je descends les marches et me mets en route tres tot. Si tot que tout est encore ferme" C'est tres etrange de parcourir les rues dans le silence et la solitude presque totale, surtout quand on s'attend a plonger dans un univers fourmillant d'activite. N'ayant plus de portable, je n'ai pas l'heure non plus. Je me suis reveillee avec la chaleur et les premiers rayons du soleil, et me suis mise en route en pensant qu'il etait grand temps... alors qu'il ne doit etre que 7h30 a peine. 

Je finis par le comprendre, et me mets a flaner, pour revenir vers la Medersa Attarine vers 9h. Entre temps j'ai envoye sur les roses un jeune homme qui me harcelait un peu trop pour me montrer les tanneries alors que je lui disais non. Ca m'agace quand on insiste alors que j'ai dit non...

Apres la medersa je me perds dans les petites rues histoire de respirer l'ambiance de Fes. Mais assez vite, je me sens oppressee. Il fait chaud, certes, mais j'ai surtout l'impression d'etre aussi energique qu'un yaourt renverse. Les echopes se suivent et se ressemblent, moi qui ne veux pas faire les magasins je cherche un endroit ou me poser tranquillement mais n'en trouve pas, meme pas un banc, un gros cailloux sur lequel s'asseoir. Je cherche un jardin, deambule dans les ruelles, me perds dans le labyrinthe des souks qui me ramenent toujours aux echopes et jamais a un coin tranquille. Je tombe sur un autre jeune, tres sympa cette fois, qui me reparle des tanneries. Bon allez, je n'ai pas vu celles de Marrakech, allons voir celles de Fes. Mais je te previens je n'ai pas d'argent alors ne m'amene pas la ou on va attendre de moi que j'achete un sac ou des chaussures ou je sais pas quoi. - Non non, pas de souci. Et nous voila partis dans un autre dedale de ruelles, en trois secondes trente je ne sais plus ou je suis (le savais-je vraiment avant ?). Il nous faut presaue un quart d'heure pour arriver au bon endroit ! Et moi je sens de plus en plus que je me traine. Ca m'etonne. Il est tot, je n'ai rien fait de special, je n'ai mal nulle part, alors qu'est-ce que j'ai a etre aussi molle ?

Evidemment ca ne rate pas, la @visite@ de la tannerie consiste en quelques explications donnees depuis un point de vue en hauteur (a quoi ca sert de m'avoir donne une feuille de menthe, je suis bien trop loin pour etre indisposee par les odeurs !), puis un tour rapide pour voir comment les artisans transforment le produit, et puis badaboum nous voila a la boutique. Je jette un oeil histoire de, mais repete que je n'acheterai pas pour acheter, je n'ai pas besoin de tout ce que je vois la, merci au revoir. 

Le jeune garcon me ramene a un croisement puis m'indique comment repartir vers mon hotel. Sur la route, je passe devant une bijouterie. J'aime les bagues ou pendentifs en argent. Je jette un oeil mais devant le vendeur qui s'avance je precise rapidement que je n'acheterai rien. D'ailleur sje lui raconte meme que je suis decue par ce qu'on m'a vendu a Marrakech. Mon lapis lazuli s'est decroche du cordon et je ne trouve pas le moyen de le refixer. Je me suis donc laissee tenter par l'achat d'un pendentif au Maroc et je le voulais en argent'. J'ai trouve un motif que j'aimais bien, et j'ai beaucoup insiste pour expliquer que je le voulais en argent et en rien d'autre. Oui oui bien sur, regardez on fait les tests, c'est de l'argent c'est magnifique. Il etait sympa ce jeune vendeur, en plus'. On a parle voyage apres, et il m'a laisse le nom d'un jeune marocain qui fait le tour du Maroc a pied et a ete interviewe a la television. Pffff.... Ca ne faisait meme pas un mois que j'avais achete le pendentif que j'ai observe qu'il noircissait. Et ca, ca me depasse. Cette faculte a vous vendre de la merde, peu importe que vous soyez satisfait ou non en fait, peu importe de vous avoir berne ou non, du moment que l'argent est sorti de votre poche pour entrer dans la leur.... Ca, je ne comprends pas. J'ai dit : je veux bien mettre le prix qu'il faut mais s'il te plait je veux quelque chose que je garderai toute ma vie en soiuvenir, pas un truc que je vais jeter dans 3 semaines. Oui oui pas d'probleme !... Je ne comprends pas cette absence de scrupule. Mais bon bref, J'explique donc tout ca a mon vendeur de Fes pour qu'il comprenne que c'est bon j'ai fait un achat, je n'en referai pas deux. Et le voila qui, tres gentiment, comme pour effacer la faute de l'autre vendeur, se propose de nettoyer mon nouveau pendentif. Non non c'est bon. - Si si, j'y tiens. Bon ok. Mais une fois qu'il m'a rendu le pendentif nettoye, et apres qu'il ait constate que decidemment je nLallais rien acheter, sa gentillesse s'est volatisilee : tres bien au revoir madame - m'a-t-il dit en me montrant la sortie. Pardon ? C'est ainsi que j'ai forge ma conviction que pour bon nombre de vendeurs, on est mille fois bienvenus tant qu'on a eventuellement l'idee d'acheter, sinon on peut aller se faire foutre, en fait...

J'etais deja en petite forme, l'exasperation aidant j'ai trace ma route jusqu'a l'hotel et gare a ceux qui voulaient m'entrainer par ici ou par la, c'etait pas le jour ! Arrivee a l'hotel je me suis enfermee dans ma chambre, j'ai pose mon sac a dos sur le lit et me suis etendue en etoile de mer, videe de mes forces. Je n'ai pas tarde a m'endormir... pour longtemps. J'ai fin par comprendre que quelque chose ne tournait pas rond et que j'etais visiblement malade. J'avais tres soif, et je n'etais bien qu'allongee. J'ai dormi avec quelques petites interruptions jusqu'a la tombee de la nuit. 

A partir de la, le temps va s'ecouler tres bizarrement. Je ne suis pas inconsciente, je n'ai mal nulle part tant que je reste allongee, mais je passe mon temps a dormir puis a me reveiller de temps en temps mais c'est comme si je n'avais plus aucune energie. Je suis incapable de me lever du lit jusqu'au lendemain midi. Quand je me reveille, je me sens trop bien dans mon lit moelleux, torse nu tellement il fait chaud, fenetre ouverte mais drap tire car sinon on pourrait me voir par nue des lucarnes de la terrasse. Je dors la plupart deu temps les bras en croix ou en foetus, lovee dans mon oreiller enorme, en gros tout va bien... si ce n'est que lorsque j'essaie de me redresser ne serait-ce que pour boire, les forces abandonnent mon corps, je suis bonne a rien, je me rempaffe sans plus bouger pour quelques heures.

Parfois j'ai suffisamment de conscience pour bouquiner un peu. Mais grosso modo... je dors ! Le lendemain en milieu de matinee je me sens enfin l'energie de tenir debout. Je vais jeter un oeil dehors, par la terrasse, il fait superbement beau et c'est tout de meme bien malheureux que je sois a - 20 de tension par une si belle journee.

En meme temps, la chaleur est toujorus aussi accablante. Mon brave gardien remarque que ca ne va pas fort. D'apres lui, c'est la forte chaleur. Il fait 50 degres - me dit-il, vous n'etes pas habituee, ca peut rendre malade. Ah bon ? Trop de soleil ca rend malade ? Mouais, je sais pas.

Je ne vois pas ce que j'aurais pu manger de bizarre ces derniers jours. Alors il a peut-etre raison. Ceci dit, ce jour-la je commence malgre tout a faire regulierement des allers et retours aux toilettes. Entre deux siestes, je me vide. Allez savoir pourquoi. Et toujours sans avoir mal nulle part a part ca. Je pense a ma trousse de secours pleine de medicaments laissee a Priscilla. Pour l'instant je ne me suis servie de rien pour moi, par contre depuis que je suis a Priscilla elle a servi pour d'autres. Quand je pense que j'ai tout ce qu'il me faudrait a Marrakech, je peste interieurement de devoir probablement faire un saut a la pharmacie qui se trouve a 50 metres pour acheter des anti diarrheiques. Mais vu la frequence, pas le choix.

 

Je prends mon courage a deux mains, le peu d'energie qu'il me reste et je descends pour aller a la pharmacie. Je repere au passage, a 20 metres de la pharmacie, un cyber cafe. Climatise, en plus. Bien. Je retourne me coucher. Des que j'aurais un peu plus de force, je redescendrai acheter des bananes car je m'inquiete de ne rien manger, et de l'eau fraiche. Et je vais au cyber ecrire sur le blog. J'ecris aussi aux filles pour les prevenir de la perte de mon telephone portable et leur confirmer que je serai de retour a la date prevue. Enfin j'ecris a April que decidemment il ne faut rien regretter car c'est a mon tour d'etre dans les choux. Elle me repond gentiment qu'elle aurait aime etre la pour prendre soin de moi, mais vraiment quand on voit que je passe mon temps a dormir, je ne crois pas que ma compagnie aurait ete d'une quelconque utilite.

Mon copain le gardien m'annonce qu'il me cuisinera du riz blanc ce soir. Trop mignon. Je sors sur la terrasse vers 20h30, lui laissant le temps de manger le ftour avant d'avoir a me faire la cuisine. Je me rejouis d'avance de manger du bon riz blanc... mais c'est un riz gluant et sans sel que je trouve dans l'assiette. Oh que c'est pas bon. C'est fade et je n'aime pas l'aspect gluant. Mais je dis merci et mange tout, pour lui faire plaisir et en esperant que ca me remette sur pieds. Le the a la menthe, lui, est delicieux par contre. J'ecris a nouveau en ecoutant les musiques vielliottes sur la terrasse.

 

Le lendemain matin, je suis toujours patraque et les toilettes sont toujours mes meilleures amies. Et bien voila, je pars demain et je comprends que je suis en train de passer a cote de Fes. Je rate prodigieusement mon rendez-vous avec la cite imperiale ! Mais alors c'est un ratage en beaute. Je n'aurai vu que le toit de ma chambre et le decor depuis la terrasse du Cascade, si on veut. La veille je suis remontee sur le toit pour assister encore au tir du canon pour la fin du jeun.

J'en suis simplement a esperer que j'aurais assez de force pour faire le trajet retour Fes - Marrakech en bus (ou ai-je pris le train ? Ma memoire me fait defaut sur ce coup-la...). Je passe donc une nouvelle journee cahin - caha, prenant deux fois le temps de mettre le nez dehors, une fois pour aller au cyber pour le blog, une seconde fois pour lire sur la terrasse et observer le spectacle de la rue plutot que mon plafond.

Par bonheur, le lendemain matin je me sens enfin un peu plus energique. Je decide d'en profiter et pars aux aurores faire un tour dans les ruelles, histoires de ne pas tout rater tout de meme.

 

Ce que je vois est magnifique et me laisse vraiment un gout de "c'est trop bete !". Je n'ai plus qu'a revenir une autre fois pour decouvrir les charmes et l'histoire de Fes. 

Le temps s'ecoule vite, je dois partir pour prendre le bus ou le train, impossible de me souvenir, le train je crois... je vois, il me semble, une gare au bout d'une grande allee plantee d'arbres...Mais je ne me souviens pas du voyage. J'ai du lire et dormir.

Ok ca va mieux mais je n'ai pas recouvre toutes mes forces et je ne mange toujours rien. Je sens d'ailleurs que j'ai perdu du poids. Je retrouve avec plaisir la place Jemaa El Fna. Je peine un peu sous le soleil, mais j'ai le sourire aux levres de retrouver tout le monde. C'est cool de rentrer a la maison ! J'arrive un peu avant le ftour.

 

Il me faudra plus d'une semaine pour retrouver le gout de manger. Entre temps j'ai perdu des kilos et je me suis trainee comme un poids mort meme si l'humeur etait bonne et que j'ai continue a bosser avec plaisir. Je ne sais pas par qui ca a commence, car Pierre - le french doctor qui venait d'arriver a Priscilla juste avant que je parte en vadrouille - a lui aussi ete malade, mais au final on a contamine plein de gens ! Driss, April, Mihow (pas la chienne, l'ami allemand d'Hana qui est venu passer une semaine a Marrakech).

Pendant le ramadan, nous reverons d'une biere avec April !

Mais j'aurais du ecouter les conseils de Siham et faire des reserves avant le debut du jeun. Car les rayons alccol sont restes fermes tout le mois. Toutes nos expeditions pour trouver le breuvage reve se sont donc soldees par un echec retentissant. Un soir de fete a la maison, je deciderai alors d'utiliser la flasque offerte par les copains de la fede, "in case of emergency", et que j'avais remplie de rhum avant d epartir. Discretement j'ai vide la bouteille dans nos deux verres, rajoute un peu de jus d'orange par-dessus et nous sommes allees deguster sur la terrasse comme deux ados, en cachette ! C'est idiot mais la privation a le don de faire tourner ce genre de desir en obsession !

 

 

J'ai rate le depart d'April. Quand je suis rentree de chez Driss, ca m'a fait tout bizarre de retrouver la maison sans elle. Trois jours plus tot nous avions passe notre pire nuit a Marrakech, je pense, alors que ca devait etre une des plus belles normalement. J'avais senti qu'April hesitait a tenter une nuit a la belle etoile sur la terrasse, alors je l'ai poussee a le faire avec moi. La nuit venue, enfin a 1h du matin, nous avons monte nos duvets tout la-haut et regarder les etoiles avant d'essayer de fermer l'oeil. Sauf que ce soir-la, les prieres n'ont pas cesse une minute dans les hauts-parleurs. Driss nous expliquera ensuite que la premiere nuit de la derniere semaine du ramadan, les prieres sont scandees toute la nuit sans interruption. Formidable... Il n'en a pas fallu plus a April, dont la sante etait decidemment bien fragile, pour etre a nouveau malade les jours suivants et jusqu'a son depart.  On lui procurera tous les remedes pour qu'elle puisse prendre son vol retour pour l'Espagne dans les meilleures conditions...

 

Le jeu d'echec m'a nargue longtemps apres son depart. C'est triste un jeu d'echec qui ne sert plus a rien. April a fait partie de ces "guests" dont la presence a contribue a mon bonheur a Priscilla. Une fille surprenante, tellement peu la ou on l'attend. J'espere pouvoir lui dire un jour que mon projet d'ecriture a avance. J'ai achete son livre sur amazon et malgre ma difficulte a bien comprendre la lecture en anglais ca me plait de l'imaginer en train de raconter son voyage en pays musulman.

Pierre aussi a embelli mes dernieres semaines a Priscilla. Ainsi que la charmeuse Djora , et la douce Morgane

Pierre, qu'Hana appellera "docteur", est etudiant en chirurgie et il est venu faire un stage d'ete dans une clinique a Marrakech. Un adorable beau gosse surdoue et d'une gentillesse craquante. Je n'ai pas arrete de me dire que j'aurais adore l'avoir comme "beau-cousin" s'il seulement il pouvait rencontrer David ! Ah oui vraiment j'aurais aime ca. Tout y etait, le charme, la culture, l'humour, la gentillesse, l'intelligence, et par-dessus tout finalement une envie de vivre et un optimisme contagieux. Ce mec est tout juste parfait. Non mais c'est vrai, qui d'autre serait capable de chanter par coeur les grands succes de la Melodie du bonheur, des Walt Dysney et des operas de tous les compositeurs connus dans ce monde ?Il vous declamde des poemes entiers et des textes d'auteurs avec une telle sensibilite qu'on laisse tout tomber pour l'ecouter. Il interprete, et on est sous le charme. 

Installe a Priscilla pour toute la duree de son stage, il fera vite partie des meubles et s'integrera completement a la vie de la maison. Il fait lui aussi son petit tour sur la terrasse, remarque ce qui necessite d'etre rafistole et s'y colle avec la meilleure volonte du monde. Il repare avec Suzanna le rideau de bambous qui est en train de s'effondrer devant les douches.. Il trouve l'idee que je n'ai pas pour enjoliver le petit coin ou Hana aime se poser le soir pour bosser et nous construirons ensemble une veranda que nous serons trop fiers de montrer a Hana. Il va faire son marche et nous concocte des boeufs bourguignons, de la soupe de poisson, de la rouille maison, etc. Bon, il reveille tout le quartier avec sa voix de stentor pendant les soirees karaokes mais sinon ce gars est juste une perle, il a un coeur enorme. Tout ce qu'il touche se transforme en or. Ah, sauf le drap de cinema. Il n'a jamais reussi a faire un bel ourlet avec la machine a coudre, mais c'est le fil qui etait trop fragile et se cassait des qu'on le regardait !

 

Doue pour tout (il y a des gens comme ca...), il peindra deux inseparables sur le mur de la terrasse et les baptisera Hana et Siham. Peu avant mon depart, il commencera a peindre un arbre, qu'il achevera alors que je suis sur la route entre New York et Montreal. Je vois le resultat sur Facebook, c'est juste superbe. Je suis fiere de lui en voyant la photo et j'ai un pincement au coeur en me realisant que je suis si loin. D'ailleurs a l'heure ou j'ecris ces mots, Pierre est retourne a ses etudes en France. Tout comme Suzanna, qui est repartie a Oxford....

 

Pierrot le tendre, le charmeur, le drole, un vrai gentil, toujours partant. Il passe la plupart de ses nuits a faire la fete et ses journees a dormir. Il va de temps en temps a son stage le matin, tout de meme. Quand il y va il rentre vers 13h, dort jusqu'a 17h puis se met a bricoler, peindre, faire son marche, cuisiner ou a se preparer pour ses soirees. Il consacre une heure par jour a ses lecons d'arabe, avec son bouquin assimyl, et il a l'air de se debrouiller. Il forme un duo detonnant avec Adil, et un trio plein de vie avec Djora et Morgane. 

J'ai rencontre Djora dans mes premiers quinze jours a Priscilla. Avec son amie Morgane, sortie des Beaux-Arts comme elle, elles ont monte leur propre association, Modjo, qui realise entre autre des tampons en linoleum pour reproduire tout type de sujet, logo, symbole, afin de personnaliser les objets (etements, objets en tout genre, sacs, etc). Elles viennent de Dijon.

Djora est d'abord venue seule pour rencontrer des artisants et commander des echantillons. Tres a l'aise dans la provocation, d'origine algerienne, elle s'entendra super bien avec Siham.

Joyeuse, charmeuse, determinee, elle deborde d'energie et elle vous embarque dans sa tornade. J'aurais pu etre impressionnee par une personnalite aussi forte. 

Mais ses yeux trahissent tellement sa gentillesse qu'elle met tout de suite en confiance. Je suis immediatement a l'aise avec elle, et j'aime l'energie qu'elle apporte dans la maison, sa bonne humeur, son humour et sa fraicheur. J'apprendrai avec plaisir son retour le mois suivant.

Morgane l'accompagne, cette fois. Elles resteront dix jours et proposeront quatre journees d'ateliers tampographie : deux journees pour les enfants, deux journees pour les adultes. 

 

Morgane est aussi douce et discrete que Djora est exuberante. Je trouverai chez Morgane les memes attentions et les memes reserves que celles dont je peux etre animee. On se ressemble, par certains cotes et je me sens tout de suite a l'aise avec cette fille posee et tendre. C'est une creme et j'adore sa compagnie. 

 

Les filles partent en journee pour leurs affaires, et je les attendais toujours avec impatience a leur retour. On les a trouvees a la maison le soir ou nous sommes rentrees de la Vallee de l'Ourika pour l'anniversaire d'Hana. Comme j'ai ete contente qu'elles soient la jusqu'a mon depart ! Sans Pierre, Djora et Morgane, il aurait manque quelque chose d'essentiel a mon sejour a Priscilla.

Il y a eu aussi tous les guests qui sont restes moins longtemps, mais qui ont ajoute leur touche personnelle a ce cadre idyllique. J'ai sympathise avec plusieurs d'entre eux. J'ai recu des adresses mails "au cas ou tu passerais par chez moi, tu es la bienvenue". Tous les jours des rencontres inattendues, enrichissantes, emouvantes, des moments de sincerite et de simplicite comme je les aime...

 

 

Apres mon depart du Maroc, a une amie qui voulait des details sur ma vie a Priscilla j'ecrirai : j'ai tout vecu, la-bas

J'ai l'impression qu'il etait fatal, a force de vivre les choses a trois mille pourcent et d'avoir sans arret le coeur gonfle de bonheur, que je ressente a un moment donne des sentiments amoureux. Je m'en ouvrirai a Morgane, la nuit de mon depart. Elle recueillera mes confidences. Je lui dirai a la fois mon trouble par rapport a quelqu'un, mais aussi mon detachement, pour ne pas dire mon scepticisme sur ce que je pouvais ressentir apres 5 mois de "solitude" et au milieu de plein de personnes toutes aussi adorables les unes que les autres. Sans compter le caractere exceptionnel du voyage et de la rencontre hors du temps et de toute contingence. Ok c'est bien joli tout ca, mais si on enleve ce caractere exceptionnel, qu'est-ce qui reste ?

Bref. Peut-etre ai-je utilise un terme un peu trop fort en parlant de sentiment amoureux. En tout cas, attirance, ca c"est sur.

Ca commence avec le sketche le plus vieux du monde. Ce soir-la, on est mercredi, il a fait tres chaud, nous sommes peu nombreux. La soiree karaoke s"annoncant calme et entre amis (ou du moins je decide de ne pas avoir trop de pudeur par rapport aux quelques guests), je suis sortie de la douche avec mon short que je porte d"habitude en pyjama (un peu court pour etre porte devant des musulmans mais tant pis). J"ai mis un tshirt sale, je ne suis pas coiffee, bref, j"ai envie d"etre en patachon ce soir. Alors que je sors la sono, les micros et le video projecteur, on frappe a la porte. J"y vais. Adil nous fait la surprise de sa visite, cool ! Il apporte une bouteille de vin, comme d"habitude, et de la compagnie. Mustapha, le prof d"anglais, accueille tres souvent des couchsurfeurs et couchsurfeuses chez lui. Ca devait etre le cas ce soir aussi, mais il a du etre hospitalise d"urgence pour un probleme a l"estomac - je n"ai pas bien su quel etait le probleme exactement mais il a du etre opere. En catastrophe il a fait appel a Adil pour jouer les hotes et les guides a sa place, et Adil le gentil a accepte.

Au moment ou j"apercois la personne qui le suit, quelque chose file dans l"air et je l"attrape au passage. Eteinte deux secondes avant, je passe en mode 320 volts. Je realise que je suis en patachon et abandonne les invites apres les avoir fait entrer pour courrir me changer et etre presentable. Ridicule, mais veridique. 

Je reviens dans le patio et finis d"installer le materiel pour le karaoke pendant que les autres, dont PIerre qui nous a rejoints, vont chercher des verres et ouvrent la bouteille de vin. Alors que je cherche par quoi commencer le karaoke pour lancer l"ambiance, Pierre suggere un air d"opera italien - qui ne figure bien sur pas dans la liste. Mais ce soir rien n"est impossible. Pas de souci, je vais chercher sur internet, sur youtube. Tu connais la cantatrice me demande Pierre. Pour epater la galerie - je l"avoue - je reponds en italien que non je ne la connais pas mais que je connais la chanson (je ne sais plus de quel titre il s"agissait). Je trouve, je lance la musique et me depeche de venir m"asseoir a la table avec tout le monde. Sans le savoir, je viens de trouver le moyen d"entrer en communication discretement avec la personne qui retient tout mon interet ce soir. Alors que je tends la main pour prendre le verre de vin que me tend Adil, j"entends "come mai parli italiano ?" (comment se fait-il que tu parles italien ?)  

Mon approche n"a rien du tout de discret, en realite, car Pierre et Adil comprennent tres vite qu"il se passe quelque chose. Il y a visiblement un contraste avec mon comportement habituel. Les yeux petillants, Adil se moquera gentiment de moi : j"adore te voir comme ca ! Bon c"est gentil mais ca, les gars, ca s"appelle arriver avec ses gros sabots... Tant qu"on ne parle pas anglais ou italien je pense qu"ils peuvent me vanner sans que ce soit compris par d"autres que nous trois, mais tout de meme leurs expressions sont un peu telephonees. Quoi qu"il en soit, si mon interet est evident les garcons et moi observerons qu"il a tout l"air d"etre reciproque. Sur la terrasse, cette sensation se confirme. On ne se connait que depuis a peine une heure mais je me sens aussi a l"aise que si on se connaissait depuis toujours (je sais c"est bateau mais difficile de decrire les choses autrement). Quel que soit le sujet, on est sur la meme longueur d"onde. Les echanges de regard se multiplient et ne me genent pas. On redescend pour ne pas faire bande a part, le karaoke est lance et on s"y met aussi. Et nos voix s"accordent sans fausse note, c"est super agreable. On ne se la joue pas micro en mains, on savoure le plaisir de chanter a l"unisson et plutot bien, si je peux donner mon avis sur la performance... Entre discussions et chansons, la soiree passe le plus agreablement du monde. Je suis spontanee et sur un nuage. "Je pars le 1er aout, on va faire la fete le 31 juillet, il faut que tu viennes - je serai la". Et la promesse sera tenue.

Apres cette soiree magique, je passerai tout de suite en mode controle. Je sais trop bien que je pars dans 9 jours. Et d"ailleurs je ne suis pas la seule a partir, on part a la meme date, mais pas pour les memes destinations, meme si de son cote le doute est present : "je dois retourner travailler sur un bateau de croisiere qui sillonne le Danube, mais au fond rien ne m"oblige a reprendre mon poste. - Et que veux-tu faire ? - Je ne sais pas. Peut-etre trouver un job dans un eco-village". J"attends impatiemment la soiree du 31 juillet, bien que la valse des "pourquoi fasse son entree dans mon cerveau. Pourquoi cette personne ? Pourquoi ici et maintenant ? Et de son cote, pourquoi moi ? Bref, je me canalise, d"autant que d"apres les programmes prevus, il n"y aura pas d"autre rencontre avant cette date.

J"apprendrai le 31 juillet qu"en fait si, il aurait pu y avoir d"autres occasions. Mais les quiproquos et les malentendus ont saborde mes chances. Je ne le sais pas, mais Adil fera office d"hebergeur pendant les deux prochaines journees. Et les deux soirs suivants, Pierre, qui va passer la soiree chez Adil, m"encourage a l"accompagner. Mais je decline, cretine que je suis, car j ignore qu il n y a pas qu Adil, chez Adil.... Peu importe.

Le 31, alors que je suis en train de regarder la performance qu"Hana execute pour moi (un cadeau qu"elle a voulu me faire pour mon depart), je vois passer dans mon champs de vision Adil, qui arrive en retard et... accompagne. Nous aurons donc une deuxieme soiree magique. Je pars d"abord avec Hana, Siham, Morgane et Djora voir un spectacle de danse cabaret execute par une troupe dont fait partie la copine d"une des guests. Puis nous rejoignons tout le monde chez Adil. La encore, nous ne nous quitterons pas d"une semelle et passerons un ,moment sur la terrasse d"Adil, d"ou on contemple les lumieres de Marrakech. A ce moment-la cependant, j"ai beau etre la plus heureuse du monde, je m"enferme dans mon raisonnement "a quoi bon". Dans quelques heures je m"en vais, alors a quoi bon... La soiree est douce, la connivence bien presente et les regards expressifs. Lorsque Djora et Morgane veulent partir a 3h du matin, malgre les regards lourds de sens je ne propose pas de rester - a quoi bon ?... Les mots sur lesquels on se quitte ne laissent pas de place au doute sur ce qu"il s"est passe. Je m"en vais quand meme. 

Dans la penombre du patio de Priscilla, j"expliquerai a Morgane que je pars, que je n"ai pas confiance dans ce que je ressens dans cette situation exceptionnelle qu"est ma vie itinerante. D"ailleurs ca fait quelque temps que je me sens "emoustillee", dira-t-on, alors je ne suis pas surprise de ce qui m"arrive la. Qu"est-ce qui m"arrive, d"ailleurs, au juste ? Une attirance. Qui ne me gene pas le moins du monde par rapport a la personne que j"aime. On le sait, ce genre de choses peut arriver. des deux cotes d"ailleurs. On ne s"est rien promis - de toute facon c"est pas le genre de la maison.

Qu"on ne se meprenne pas, cependant, sur les larmes que j"ai versees dans l"avion en quittant le Maroc. C"est Priscilla que j"ai pleure. Les personnes qui ont partage mon quotidien. Et tout ce que j"ai vecu d"extraordinaire la-bas. Cette rencontre ne m"a pas laissee triste. Au contraire. Par contre, a peine le dos tourne en quittant la maison d"Adil, apres les "pourquoi" et les "a quoi bon", c"est la valse des "et si" qui a enchaine. Et si j"avais su qu"en allant chez Adil les deux jours qui ont suivi notre rencontre... et si j"avais ose un geste, une parole avant qu"il soit l"heure de partir ?... Alors a New York, au bout d"une semaine, pour faire taire ces elucubrations une bonne fois pour toutes, j"ai cherche ses coordonnees et envoye un mail. Auquel je n"ai jamais eu de reponse. Mais peu importe. Je ne peux me dire ni "tant mieux" ni "tant pis". Au moins ai-je fait ma part du chemin. Et l"essentiel pour moi est que cet instant magique soit preserve dans ma memoire tel que je l"ai vecu sur le moment. Priscilla, a wonderfull place where one can meet wonderfull and inexpected people... C"est ca qui reste grave dans ma memoire, parce que c"est ce que j"ai vecu.

Bon j'ai beaucoup parle des bons moments, des franches rigolades et des multiples soirees festives, mais qu'on ne s'imagine pas qu'on ne travaillait pas ! Les journees etaient bien remplies, de travaux physiques comme de taches intellectuelles ou d'organisation. J'ai fait la betise d'envoyer a mes parents mes photos du Maroc en oubliant de garder celles dont j'avais encore besoin, il me manque donc plein de photos pour illustrer la vie la-bas. Tant pis, on se contentera de celles que je n'ai pas encore effacees....

On n'arretait pas de bosser, en fait, mais on le faisait toujours dans la bonne humeur et les rires...Enfin la j'embellis car j'oublie deja que parfois les tensions plombaient tout de meme l'ambiance, mais de loin en fait, car le sourire n'etait jamais difficile a retrouver. Je ne pense pas avoir passe une seule journee sans eclats de rire, a Priscilla. 

 

 

Cote boulot, le partage du ftour - idee lumineuse de Siham, nous en aura donne beaucoup ! Au point que je finisse par suggerer qu'on cesse de le faire tous les soirs mais que cela fasse partie des evenements a Priscilla. Qui dit evenement dit ponctuel. Je proposais deux fois par semaine, si j'ai bonne memoire. Pendant tout le mois du ramadan on l'a presque toujours propose. Par la suite, les filles ont une nature trop genereuse pour avoir retenu ma proposition. Il est vrai que ca fait partie du charme de la maison, ces moments conviviaux. 

Mais pour nous - je dis "nous" mais je n'etais pas la plus a plaindre - ca representait un sacre travail. A partir de 16h, le ballet commencait. Samirah aux fourneaux, d'abord seule. Driss partant et revenant des courses au fur et a mesure des commandes. Puis les deux ne quittaient plus la cuisine et appelaient en general Suzanna en renfort (je pense que j'ai tellement dit que j'etais nulle en cuisine qu'on ne m'a jamais fait confiance sur ce coup-la !) Au debut, Babou venait aider egalement. Apres la facherie, c'est Yacine qui a pris le relais. Siham etait souvent de la partie aussi, elle qui adore cuisiner et qui aime surtout que les gens soient a leur aise, mangent bien et soient contents. Moi j'intervenais un peu plus tard pour la mise en place. La plupart du temps on se cassait la tete pour emboiter toutes les tables en fonction du nombre de guests. Parfois on a etendu des tapis par terre et mange assis sur les tapis. A 19h45, des les premiers mots de l'appel du muezzin, avec un ahhhh de relachement et de satisfaction on commencait le service. Et puis apres le repas... il fallait faire la vaisselle ! On finissait un peu sur les rotules, tout de meme. Surtout ceux qui avaient cuisine. Mais c'etait vraiment de belles tablees, et de biens belles images gravees dans ma memoire. 

Lavage des sols

Avant de parler de ma derniere soiree a Priscilla, je veux parler des ateliers que les filles ont anime avec les enfants. Parce que ca aussi, c"etait des moments magiques, des moments de tendresse. 

 

 

Et puis de mes problemes epiques avec la Banque postale suite a une fraude sur mon compte bancaire ! 

Lorsqu'on sort de Priscilla, on s'engage dans un petit dedale de ruelles qui conduisent a une des arteres principales pour retourner a Jemaa El Fna. Dans ces ruelles, les enfants jouent dehors, Assis par terre, ou bien ballon au pied, ou encore en s'amusant a se suspendre aux fils electriques...

 

Les filles adorent les enfants et tiennent a leur proposer des activites, histoire de les occuper et de leur apprendre quelque chose. 

Nous commencerons par organiser des projections de films le dimanche. Mustapha a trouve des documentaires animes tres courts, en arabe. Un dimanche, nous accueillons une quinzaine d'enfants. Comment ont-ils su ? C'est simple. Siham en a parle a l'un d'eux, qui l'a repete a son copain, qiu en en informe un autre copain, etc.... 

Siham et Driss les font asseoir sur les canapes du patio, le temps d'attendre les retardataires. Samira a prepare des jus d'oranges et fait cuire du pop corn. En arabe, Siham donne les regles, et tous les gamins l'ecoutent religeusement. Ce premier jour, je remarque qu'il n'y a que des petits garcons. Mais ou sont les filles ?? La prochaine fois on s'assurera que le message passe aussi aupres des filles ! 

Apres la distribution de jus d'orange et de pop corn, nous accompagnons les enfants dans la chambre des residents (la piece ou je dors), dans laquelle nous avons installe des tapis au sol et un drap blanc au mur. La projection demarre.

Apres le film, Siham pose des questions aux enfants. Je voudrais pouvoir comprendre l'arabe pour savoir ce qu'ils ont a dire, tous levent le doigt, veulent parler, parfois disent des betises car alors tout le monde s'esclaffe. Driss et Siham temporisent leurs debordements d'energie. C'est mignon comme tout. 

 

Evidemment il y a aussi les turbulents qui n'ecoutent pas vraiment ou repondent systematiquement des aneries. Ceux-la sont menaces d'etre exclus pour ne pas perturber la seance. 

 

Un autre dimanche, on leur passera le livre de la Jungle. Cette fois il y aura des filles. La capacite d'attention des enfants ne depasse pas une heure. On n'ira pas au bout du film, trop long pour eux - et pour nous aussi car c'est usant ! Mais ce sont de tres bons moments. 

L'atelier tampographie aura beaucoup de succes. On organise deux groupes. Djora et Morgane ont apporte leur materiel et animent les seances, Siham faisant la traduction. J'aime la tendresse et les rires de des ateliers. J'adore regarder Siham et Driss en action, la facon dont ils regardent les enfants, dont ils leur parlent. Samira aide autant qu'elle peut et donnera un bon coup de main avec les petits pour la tampographie. Les enfants sont attentifs et fiers d'eux. Apres avoir appris a encrer leurs tampons et trouver leurs motifs personnels, ils creeront tous leur propre tshirt. Pour moi, 3h dans le chahut des enfants c'est beaucoup, beaucoup trop. Je m'eclipse regulierement dans la cuisine pour faire un break. Et je suis fascinee par les filles, qui tiennent jusqu'au bout et avec le sourire. Mais y a pas a dire, ce sont de supers souvenirs et des moments de complicite avec les enfants. 

L'atelier tampographie, on y aura droit nous aussi, d'ailleurs. Djora et Morgane nous installerons autour d'une table et nous apprendrons a sculpter le linoleum pour dessiner notre motif avant de creer nos propres tshirts et sacs. Et je dois dire que c'est hyper prenant, on se prend au jeu, on etait tous ultra concentres et super appliques !

Suzanna animera egalement un atelier, la veille de mon depart. Confection de maisons en papier. Les enfants sont ultra participatifs, et les guests profitent de l'ambiance, voire meme, participent !

Dans ce petit monde idyllique, je vais connaitre des soucis avec ma banque (la Banque postale) suite a des retraits frauduleux sur mon compte. Demarre a la mi-juin une histoire a episode qui ne se solutionnera que deux mois et demi plus tard.

A la mi-juin, en consulutant mon compte en ligne, je decouvre que le meme jour trois retraits de 200 euros ont ete effectues soi-disant par carte bancaire a un distributeur, a Marrakech. Etant donne que je n'ai pas fait ces retraits, j'appelle aussitot ma banque pour signaler la fraude. On me dit de faire opposition sur ma carte et de demander un renouvellement. Ce que je fais par telephone, puis je confirme ma demande par mail et par courrier recommande. Au passage, je passerai 3h a la poste de Jemaa El Fna pour envoyer mon recommande... Entre le moment ou j'arrive dans le batiment, le moment ou je comprends ou je dois me positionner pour les recommandes, l'attente dans la bousculade en troupeau aglutine devant le guichet sans ordre de passage et avec tentatives de depassement de tous cotes et meme par des petits vieux, sans compter la pause dejeuner de l'employe (ce qui ne fait pas bouger les lignes, au contraire on continue meme devant un bureau vide a jouer des coudes pour gagner une ou deux places).... 3h pour un courrier.... Je reviendrai epuisee de n'avoir rien fait ! 

Mais bref, j'ai confirme par oral, par mail et par courrier ma demande de renouvellement de carte bancaire et communique une adresse a Marrakech pour la recevoir. Je suis tranquille, je reste encore un mois a Marrakech, a priori il n'y a pas de raison pour que je ne recoive pas la carte en temps et en heure.

 

La seule chose positive que je puisse signaler sur ce dossier, c'est que la fraude a ete prise en compte et que j'aie ete recreditee assez rapidement des 600 euros voles. Mais pour le reste.....

 

En attendant de recevoir ma nouvelle carte, je vis sur le 2eme compte bancaire que j'avais ouvert en cas d'urgence et sur lequel j'ai place une toute petite somme. 

Mais les jours passent, et je n'ai pas de nouvelle. Patiente, j'envoie un message mail a ma banque. Pourriez-vous me dire s'il vous plait madamde la banque quand je suis censee recevoir ma carte, je vous rappelle que je quitte le Maroc le 1er aout et que s'il y a le moindre risque que je recoive pas la carte en temps et en heure il vaut mieux ne pas me l'envoyer.. Bref, je tente de prendre toutes les precautions pour les alerter. Pas de reponse. Etonnant. Je renvoie un mail quelques jours plus tard. Rien. On commence a se rapprocher dangereusement de la date de mon depart. J'appelle de mon portable. "C'est pas ce numero qu'il faut appeler c'est un autre". Ok, je tente le numero des urgences a l'etranger. "En raison d'un probleme technique nous ne pouvons pas donner suite a votre appel, merci de renouveler, clic". Oh oh, ca commence a sentir mauvais et je commance a peter les plombs avec l'incompetence de la LBP. Je tente le numero de mon centre financier. La boite vocale me demande de m'identifier avec mes deux codes. Je m'execute. Desolee, nous n'avons pas pu vous identifier, reessayer. Ah bon ? J'ai fait une erreur en appuyant sur une mauvaise touche ou quoi ? Je resaisis mes identifiants. Desolee, nous n'avons pas pu vous identifier. Arghhh ! Je recommence. Toujours pas, et clic ca raccroche. Je retourne sur mon compte en ligne pour verifier mes identifiants, mais la surprise : le fait d'avoir echoue trois fois dans la reconnaissance par telephone m'a bloque mon acces sur internet ! Je n'ai plus acces a quoi que ce soit ! Je suis verte de rage et sur le cul de tant de complications pour un service cense etre celui des urgences a l'etranger ! Tous les numeros de telephones que je tente ne repondent pas ou bloquent a l'identification, et je ne peux plus envoyer de mails. J'explose. Et je suis censee faire quoi ?!! Priscilla m'entend pester dans toute la maison sur ces abrutis de la banque postale. Et toujours pas moyen de savoir si ma carte est partie ou pas. Je sens que ca va mal finir, je sais que je ne recevrai pas ma carte a temps...

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J'ai alors une illumination. Je retrouve le mail recu a propos du remboursement de la somme qui m'a ete volee. Pour une fois il y a un nom et un numero de telephone fixe, dans la signature du mail. J'appelle depuis un centre d'appel telephonique dans la Meddina (c'est qu'entre temps j'ai bien sur explose mon forfait d'appel a l'etranger sur mon mobile, bloquant mon telephone au passage...). J'arrive enfin a avoir quelqu'un au bout du fil. Quelqu'un qui n'est pas celui qui est cense repondre a mes questions mais qui, pour une fois, comprend le probleme et veut  bien sortir de sa mission habituelle pour me trouver une solution. Que dieu benisse ce brave homme jusqu'a la 100 eme generation, je maudis tous les autres qui ne savent que repondre "c'est pas moi c'est l'autre service, je peux rien pour vous, clic". Le monsieur me promet de se renseigner et il le fera. Il m'ecrit un mail apres avoir enquete et j'apprends alors que ma nouvelle carte bancaire a ete envoyee... a Maisons-Alfort ! Ben oui bien sur. C'est pas comme si je ne leur avais pas deja ecrit 100 fois en gros et en gras que je suis a l'etranger pour un long moment ! Je suis folle.... Evidemment la carte n'a pas pu etre recuperee donc elle est en souffrance au courrier et va retourner chez le fabriquant. Le gars parvient a me faire retrouver un acces a mes comptes en ligne, et m'explique point par point ce que je dois faire des que j'aurais trouve une adresse fixe ou me faire envoyer ma carte aux USA ou au Canada. 

Je quitte donc le Maroc sans ma carte, en continuant a vivre sur le compte dedie aux urgences. 

La fin de ma vie  a Priscilla arrive si vite que je ne realise pas. Je ne veux pas realiser en fait. Je repousse l'idee, je veux profiter de chaque instant encore, je ne laisse pas de place a la nostalgie anticipee. Je tache donc de vivre les derniers instants de la facon la plus intense possible, consciente du bonheur que j'ai eu la chance de vivre tous les jours depuis mon arrivee ici. Je ne veux pas que ca s'arrete. En meme temps je ne regrette pas mon choix de partir. J'ai hate de savoir ce qui m'attend apres. Hate de retrouver la route. Mais tout de meme, j'ai le coeur lourd a l'idee de quitter mes amis, ma famille marocaine. Tous les jours on echange des regards lourds de sens avec Hana, Siham, Samira, Driss, Suzanna. Ils ne cessent de repeter qu'ils ne veulent pas que je parte. Siham prend un peu de distance sur la fin. Hana m'annonce un jour qu'elle veut me faire un cadeau pour mon depart. Elle, la danseuse professionnelle que je n'ai jamais eu l'occasion de voir danser a part lors des fetes de Priscilla ou lors de la soiree ou nous sommes tous partis en boite avec Pierre, Morgane et Djora, elle veut m'offrir une performance. Hana est une pro de l'impro. Pour imaginer ce qu'elle souhaite faire, elle me demande de lui donner de la matiere. Elle veut des mots, des phrases, des images, quelque chose qui pour moi parle du passe, du present et de l'avenir. 

Je prends le temps de reflechir. Et un jour je lui laisse un petit mot avec trois phrases. 

 

Pour le present, j'ai choisi une citation de Nicolas Bouvier qui est devenue ma devise. Hana l'a reproduite sous forme de question le jour de sa performance : 

Pour le present, une citation extraite de mon livre prefere, L'Art de la joie, de Gogliarda Sapienza. Un des personnages dit ceci a l'heroine : 

Et pour l'avenir, une autre citation de L'Art de la joie. Cette fois c'est l'heroine qui prononce cette phrase a l'attention des enfants devenus jeunes adultes : 

Un apres-midi, Hana part repeter dans la maison d'Adil. Un seul apres-midi pour reflechir a sa performance. 

 

Mon dernier jour a Priscilla et au Maroc est arrive, J'ai serre Samira dans mes bras au moment ou elle est repartie chez elle le soir. Samira qui aura illumine mes journees a Priscilla par ses sourires, ses chansons, ses blagues et ses petites attentions. 

Un peu avant le debut de la soiree, nous avons prevu un skype avec mes parents. Je suis dans le patio et Hana au "bureau" lorsque celle-ci m'appelle d'en haut : Paaaat, il y a ta maman qui appelle, je decroche ! Le temps de monter la rejoindre, je l'entends avec Siham entamer la conversation avec mes parents ! Elles me font rire. "Comment ca va maman ? Bonjour papa !" Je les vois faire coucou et les voila qui se tapent la discute avec mes parents. Je n'entends pas ce que mes parents disent, mais je pense qu'ils ont du remercier les filles pour le bien que m'a fait mon sejour avec elles. "Elle est unique, votre fille !" - dit Hana, et Siham ajoute : "c'est grace a vous qu'elle est comme ca". Je trouve ce moment trop mignon. Elles disent au revoir et me laissent avec mes parents qui entendent la musique dans le patio. C'est que nous etions en train de ranger a grand renfort de Mother Superior et Zina, bien sur, les incontournables chansons de Priscilla qui me donneront toujours la patate par la suite... 

Une des guests, Jodie, nous a parle du spectacle de cabaret dans lequel evolue son amie. La premiere representation a lieu ce soir. Nous avons decide d'aller assister au spectacle. Mais avant de partir, les amis m'ont prepare quelques surprises. Suzanna m'a interdit l'acces a la cuisine en fin d'apres-midi. Juste apres son atelier avec les enfants elle est partie faire des courses et m'a cuisine un delicieux gateau au chocolat ! Pendant que je le savoure avec elle dans la cuisine, on m'appelle dans le patio. Les tables et chaises ont ete poussees de cote pour faire de la place. Hana s'etire. Elle a pose son ordinateur sur le petit frigo. Nous prenons place, et elle explique a tout le monde ce qu'elle m'a demande pour creer sa performance. Elle scotche mes phrases sur le frigo, le mur et la vitrine du Cooli Cool. Silence dans la salle... Musique.... 

 

Pierre filme sa performance avec mon appareil pour que je puisse etre toute entiere concentree sur le spectacle. Je decouvre Hana comme je ne l'avais jamais vue encore. Elle m'impressionne.

Moi qui ne suis pas experte en art moderne et encore moins en danse contemporaine, j'admire la maitrise qu'elle a de son corps et je ressens les emotions qu'elle transmet. Chacun des trois tableaux durent un bon moment. Pour le deuxieme, representant le present, elle danse avec un bandeau sur les yeux. J'aime les musiques qu'elle a choisies pour ses performances. 

Lorsqu'elle termine, elle est en nage. Je la sers dans mes bras tres fort. Je suis super touchee... Et je suis super contente que Pierre ait tout filme !

 

La personne que j'esperais revoir ce soir-la est arrivee entre temps avec Adil. On passe du temps ensemble, avant de se separer puisque je me prepare a partir avec Siham, Hana. Morgane et Djora pour voir le spectacle de danse de la copine de Jodie. Adil et son hote repartent, on se rejoindra apres le spectacle chez Adil. Alors que je suis retournee en cuisine manger un autre morceau de brownie, Pierre, Djora et Morgane m'appellent a nouveau dans le patio. Je reviens et les decouvre tous les trois micro en main face a moi. Les premieres notes de Stand bye me, ma chanson preferee, demarre, et ils m'interpretent un super trio trop drole et touchant. 

Nous finissons de nous preparer puis filons prendre un taxi pour aller dans Gueliz voir le spectacle de cabaret. Interessant et drole le premier quart d'heure, nous trouvons vite le temps long... Le cabaret c'est rigolo 5 minutes mais bon. Pas trop mon truc tout de meme. Puis nous reprenons un taxi durement negocie par Djora pour aller chez Adil. Le taxi nous depose pas loin de Jemaa El Fna. Quel plaisir de retraverser encore cette place animee pour ma derniere soiree !

Sur les 20 minutes de marche a pied que nous aurons pour rejoindre la maison d'Adil, je decouvre le calvaire que vivent les femmes feminines au Maroc ! Alors que les gars se sont a peu pres tenus pendant le ramadan, maintenant c'est du grand n'importe quoi ! Tous les 100 metres nous croisons des groupes d'hommes, jeunes ou moins jeunes, et tous louchent sur les decolletes et les jambes de Morgane et Djora. Et les insinuations salaces fusent. Djora repond chaque fois vertement. Ceci dit c'est tellement oppressant qu'elle monte d'un cran en tension et qu'on en arrive presque aux mains avec un des gars qui a bu. J'y vais de ma petite colere. Un des amis du type ivre me reconnait. C'est un des vendeurs que je croise tous les jours dans la medina, un de ceux qui m'appelle marrakchia. Il vient vers moi et s'excuse pour son ami. J'apprecie mais n'empeche, son pote est un gros con et je suis assez sideree de voir que les gars ne savent pas se tenir. Des animaux en chaleur ! Et qui ne se permettraient pas de parler comme ca a une marocaine. Ca en dit long sur le regard qu'ils portent aux occidentales. 

Nous arrivons chez Adil. Je retrouve ma place a 5 cm de la personne que j'avais envie de revoir. Cette soiree sera un peu bizarre en fait. Adil et Pierre sont partis dans un delire avec leurs amis deja presents et nous aurons du mal a les rejoindre dans leur delire. Moi je m'en fiche, je suis la ou je veux etre, avec toutes les personnes que j'ai envie de voir. Pendant que je passe un moment en tete a tete sur la terrasse, Siham et Hana, qui ont compris et sont fatiguees, sont reparties a Priscilla. Djora et Morgane finiront par avoir envie de rentrer vers 4h30 du matin. Je quitte donc a regret les lieux et surtout la personne avec qui je voulais rester, et nous rentrons a Priscilla dans le silence des rues de la medina. Nous passons encore un petit moment sur la terrasse, je discute seule avec Morgane et nous parlons de mes sentiments ambigus. Puis je descends boucler mes affaires dans ma chambre sous les yeux d'un Driss triste. Doublement triste et abattu depuis la veille puisqu'il vient d'etre victime grosso modo de la meme escroquerie de la part de son meilleur ami que celle dont j'ai ete victime de la part de mon ex copain il y a des annees de ca. Nous parlons beaucoup avec Driss, j'essaie de lui remonter le moral mais je le sens au plus mal. Il me laisse entendre qu'il va probablement devoir quitter Priscilla pour trouver un travail plus remunerateur car il se trouve maintenant en grande difficulte. J'apprendrai deux ou trois semaines apres mon depart qu'effectivement il est parti...

Tout est calme dans la maison. Tout le monde dort. Il me reste 1h30 devant moi avant de partir. J'ai dit au revoir a tout le monde, j'ai serre tout le monde dans mes bras, je sais que je ne les reverrai pas a 7h, heure de mon depart. Driss et moi fumons une derniere cigarette ensemble dans le patio, dans le silence et l'obscurite. Et puis je le sers dans mes bras aussi, mon petit frere qui a de gros ennuis. Et nous allons nous coucher. Je crois que je m'endors tout de suite, le coeur lourd. Cette fois c'est sur, je m'en vais, c'est termine...

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